ALPHA IBRAHIMA KEIRA : une ligne de défense plutôt discutable

Les allégations selon lesquelles l’ancien ministre de la Sécurité aurait emporté des objets ne lui appartenant pas seraient banalement passées inaperçues. Dans le flot incessant de l’actualité guinéenne ultra-dominée par le débat sur la nouvelle constitution, on aurait vite fait d’oublier cette polémique qui s’apparente à un fait divers. Sauf que l’intéressé lui-même nous oblige à regarder tout ça de plus près. Ce, parce qu’en essayant de se défendre, Alpha Ibrahima Keira évoque malencontreusement des détails qui intriguent, aiguisent la curiosité et prêtent à équivoque.

De toute évidence, le désormais ministre conseiller à la présidence aurait pu se contenter des propos de son successeur. Celui-ci, sans aller dans les détails, s’est borné à démentir les allégations. En somme, Albert Damantang Camara a indiqué que son prédécesseur n’avait rien emporté qui ne lui appartienne pas. L’essentiel en peu de mots. Malheureusement, celui au secours duquel il essayait de voler ainsi n’aura pas compris la subtilité. Ainsi, il s’est confié à nos confrères d’Africaguinee. Et de sa sortie, on a une idée plus  précise des objets qu’il a emportés. En effet, à nos confrères, il déclare : « quand vous êtes fonctionnaires et que vous voulez améliorer votre bureau, où vous passez beaucoup plus de temps qu’à la maison, vous pouvez mettre ce que vous voulez : amener une radio, un expresso, une camera de surveillance, etc. Et lorsque vous quittez, si vous voulez, vous prenez vous partez avec ; si vous ne voulez pas, vous laissez ». De cet extrait, il ressort que la base de sa défense repose sur le fait que les objets qu’il a emportés – il reconnait implicitement l’avoir fait – lui appartenaient, parce que les ayant emmenés avec lui. C’est peut-être bien vrai.

Cependant, cela n’obéirait à aucune logique. Un ministre apportant de sa maison ou achetant de sa poche une caméra de surveillance destinée à son bureau de service…ça ne colle pas. Dans un pays où le grand public pense que les ministres se servent davantage de leurs fonctions, une telle affirmation sera difficilement admissible. Surtout, on peut se demander pourquoi Alpha Ibrahima Keira aurait-il choisi de faire montre d’une telle magnanimité ? Le ministère ne disposait-il pas des ressources lui permettant d’acheter ces objets-là ? A priori, si. Une requête de sa part a-t-elle été refusée ? Le grand public n’en a point été informé. Mais dans tous les cas, une telle éventualité est très peu probable, dans la mesure où si requête il y a avait eu, celle-ci n’aurait eu aucune difficulté à passer. En effet, il est plutôt compréhensible qu’un ministre veuille acquérir ce genre d’objets pour son bureau.

Par ailleurs, Alpha Ibrahima Keira ne semble pas si sûr de lui. D’où cette autre déclaration de sa part : « Maintenant si le ministère lui-même ne me crée pas de problèmes et que c’est des voyous installés en ville qui se permettent de raconter du n’importe quoi sur les personnalités du pays, ce n’est pas sérieux ». Mais pourquoi envisager l’éventualité que le ministère puisse lui créer des problèmes ? Pourquoi une telle option, alors qu’à priori les objets n’appartiennent pas à ce ministère ? En réalité, cet extrait trahit le ministre. Ces propos-là nous amènent à croire qu’au-delà de toutes ces affirmations, Alpha Ibrahima Keira se reproche quelque chose. En tout cas, il est en proie à une certaine fébrilité. Bref, tout seul il se met dans de sales draps par rapport à cette histoire.

Principal enseignement ? La communication est un exercice délicat qu’il faut savoir manier avec une certaine prudence.

Boubacar Sanso BARRY

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Facebook
Facebook
YouTube
%d blogueurs aiment cette page :